Ciné Yam session 10 : une décennie de partenariat pour le développement rural au Burkina Faso

Du 22 février au 26 mars 2025, la dixième session du Ciné Yam a enfin pu se tenir avec la venue de Boris Claret et Isabelle Dario à Ouagadougou, un événement très attendu malgré un contexte international difficile, marqué par le retrait de nombreux acteurs de la coopération et une situation sécuritaire tendue.

Depuis 2015, le Ciné Yam, fruit d'un partenariat de dix ans entre La Trame, l'AZN et Terre Verte, œuvre pour soutenir le développement rural écologique et social dans la zone sahélienne du Burkina Faso. Ce projet unique met en lumière et promeut, à travers des documentaires, les pratiques agro-écologiques que les paysans sahéliens développent depuis plus de 30 ans à la Ferme Pilote de Guiè.

Une pause de notre collaboration depuis juillet 2022, due à des obstacles techniques et sécuritaires, a fortement impacté l'ensemble des projets en cours. La production de films était principalement ralentie par des outils de montage obsolètes.

Heureusement, grâce à nos partenaires, notamment Terre Verte via le consortium Galiléo, et à nos relations au Burkina, nous avons enfin pu réunir les moyens complémentaires indispensables à cette mission. Et dans le cadre du FESPACO, célèbre festival de cinéma à Ouagadougou, grâce à nos amitiés cinématographiques burkinabé, nous avons pu contourner in extrémis les difficultés d'obtention de visa dû au principe de « réciprocité » appliqué par les autorités Burkinabé en réponse aux blocages systématiques des visas par la France.

La contrainte « sécuritaire » a toutefois empêché de séjourner et travailler à la Ferme Pilote de Guiè et ce sont les équipes d'AZN et de Terre Verte qui ont rejoint le groupe à Ouagadougou avec des conséquences non négligeables sur l'organisation et les coûts de la mission.
Malgré ces adversités, le programme et les objectifs ont été adaptés pour faire de cette session un succès.

LES MOMENTS FORTS DE LA SESSION 10

Une immersion au FESPACO
Une équipe du Ciné Yam récemment renforcée s'est confrontée aux fondamentaux des écritures documentaires à travers la riche programmation de ce festival panafricain. Le visionnement d'une éclectique sélection de films a nourri les échanges et, selon toute attente, le travail futur de l'équipe. L'intégration récente d'Aristide au Ciné Yam (formé en communication) et le renfort de Joël (amateur d'informatique de Terre Verte intéressé par le cinéma) ont constitué une grande satisfaction pour les piliers historiques de l'équipe, Mady et Blandine.

La formation aux nouveaux outils
La semaine suivante a été consacrée à la réception et à la prise en main du nouveau banc de montage et de son logiciel (DaVinci Resolve Studio). Comme à l'accoutumée, cette phase de transfert de compétences techniques s'est faite au travers d'un projet concret de réalisation. En l'occurrence, cette formation s'est appuyée sur l'exploration des images déjà tournées du film en cours de fabrication sur l'École du Bocage (CFAR). Visionnage des rushs, montage de séquences, retours critiques sur les travaux réalisés en autonomie, reprise de l'écriture avec le concours du Comité de Pilotage, évaluation de ce qu'il manque, organisation des tournages complémentaires.

Les tournages à Guiè – Une première prise de contacts avec l'équipe d'ISIS
Lors de la troisième semaine, l'équipe burkinabé a rejoint sa base de Guiè avec une très longue liste de tournages complémentaires à réaliser. Malgré le souhait d'accompagner ces tournages, notamment pour les entretiens sensibles, au moins sur une journée, les considérations sécuritaires ont prévalu, imposant le maintien de l'équipe de coordination à Ouagadougou.

Cette situation a toutefois été l'occasion d'approfondir une perspective longtemps reportée : le développement indispensable de liens entre le Ciné Yam et des acteurs locaux de l'audiovisuel, en vue de renforcer et d'accélérer l'autonomisation et la pérennité de l'atelier. Une démarche amorcée par le passé, concrétisée cette fois lors de rencontres très chaleureuses avec les responsables de l'ISIS (Institut Supérieur de l'Image et du Son), également partenaire de l'ENSAV de Toulouse (École Nationale Supérieure de l'Audiovisuel). Des rendez-vous ont été pris pour la fin de mission entre tous les partenaires potentiels.

Le montage d'une maquette du film CFAR
Lors de la quatrième semaine, la dernière pour le groupe réuni de nouveau à Ouagadougou, le travail de montage a été relancé dans la perspective de produire une maquette du film sur le CFAR. Les images récoltées lors de la semaine de tournage se sont avérées inégales, en raison d'un programme trop chargé. Une version provisoire a néanmoins pu être montée et soumise au Comité de Pilotage. Ce dernier a ainsi pu mesurer les imprécisions et les limites de l'écriture de la version 1, dont il est en partie responsable. Il a été décidé de reprendre plus sereinement cette phase de réécriture avant de relancer les tournages. La Trame assurera à distance l'accompagnement pour le reste du travail de réécriture, de tournage et de postproduction, y compris par transfert de fichiers lourds depuis Ouagadougou.

Le renouvellement des visas – Le Partenariat Terre Verte – AZN avec ISIS
Durant les derniers jours de la mission, à l'invitation de Terre Verte, l'opportunité a été saisie de renouveler localement les visas pour un an, leur obtention depuis la France étant très incertaine. Cette démarche permettra de planifier une nouvelle session de travail en limitant ce type d'impondérable majeur.

Enfin, lors d'une dernière session de travail avec les représentants de l'ISIS, de l'AZN, de Terre Verte et de La Trame, les bases d'un futur partenariat ont été posées. Celui-ci impliquerait des étudiants en master documentaire de l'ISIS et l'équipe du Ciné Yam de Guiè, pour des réalisations conjointes sur des sujets de développement rural nécessaires à la dynamique de l'AZN et de Terre Verte.

PERSPECTIVES POUR L'AVENIR
• Achever le film sur le CFAR : la finalisation de ce projet constitue une priorité pour le Comité de Pilotage, avec un accompagnement à distance assuré par les réalisateurs de La Trame.
• Renforcer le partenariat avec l'ISIS : une visite de terrain des responsables de l'institut est prévue sur au moins deux jours à Guiè afin de leur permettre de mesurer pleinement le potentiel et l'étendue des coopérations possibles avec l'équipe du Ciné Yam. Réciproquement, un séjour de cette dernière à l'ISIS est également envisagé.
• Une nouvelle mission en 2025 : pour mieux accompagner ces objectifs, une nouvelle mission des réalisateurs de La Trame à Ouagadougou pourra être planifiée d'ici février 2026, d'autant que sa faisabilité technique et financière semble raisonnable.
• Une vision à long terme : au-delà des perspectives immédiates, cette décennie de partenariat repose sur des valeurs fondamentales, bien éloignées des échéances des projets classiques de coopération. Dans un contexte de plus en plus contraignant, et face à de nombreuses adversités, toute forme de désengagement apparaîtrait comme politiquement, humainement et stratégiquement déplacée.
Il n'est d'ailleurs pas exclu d'assister à l'avenir à un renversement des tropismes Nord/Sud, où les expériences agricoles, environnementales, sociologiques et organisationnelles acquises par les sahéliens deviendraient précieuses pour les territoires européens, confrontés aux conséquences des bouleversements climatiques et des dérives des agricultures industrielles.

D'ici là, plusieurs idées de films à réaliser sont déjà en réflexion au sein de l'équipe du Ciné Yam :
« Qu'est-ce qu'une Ferme Pilote ? », « La valorisation des pratiques agroécologiques dans les périmètres bocagers », ou encore, plus ambitieux, « La révolution du foncier rural ».